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Épisode 12 / Mon Quotidien – Qui voit vraiment ceux que l’on croise chaque jour en entreprise ?

Par Coach Oumar Sy

La où chacun est à sa place, figé dans une mécanique bien huilée, dans un enchaînement de rôles définis, de titres accrochés aux portes et de responsabilités consignées dans des organigrammes rigides. Dans cet édifice impersonnel que l’on appelle entreprise, il y a des strates, des niveaux, des codes tacites que nul ne questionne.

Le gardien veille, la femme de ménage nettoie, le stagiaire apprend, la secrétaire organise, le cadre exécute, le directeur décide. Tout semble à sa place, parfaitement ordonné, une symphonie bien réglée où chacun joue une note prédéfinie, sans fausse dissonance apparente.

Mais si l’on s’arrêtait, ne serait-ce qu’un instant, pour regarder autrement. Si l’on se demandait, un jour, ce que voient ces visages que l’on croise sans jamais vraiment observer.

L’organisation d’une entreprise, sous ses airs d’architecture stable, est en réalité une structure mouvante où chaque individu porte son propre poids, ses propres luttes invisibles. La compétence et la reconnaissance ne s’y distribuent pas toujours selon la valeur réelle de l’apport de chacun, mais selon des normes ancrées, des habitudes, des inerties systémiques qui dictent à qui l’on prête attention et à qui l’on refuse un regard.

Un autre regard sur ceux que l’on croit connaître

Le gardien, posté à l’entrée, silhouette effacée que l’on frôle chaque matin sans y prêter attention. Il ne parle pas, il observe. Il a vu des carrières naître et se briser, des ambitions grandir puis s’éteindre, des regards lourds d’inquiétudes et des silences chargés de résignation. Il sait qui salue par réflexe et qui ignore par habitude. Il perçoit, mieux que quiconque, la tension d’un employé qui redoute un entretien, l’assurance surjouée d’un cadre qui dissimule un doute, l’arrogance d’un dirigeant qui ne regarde que droit devant. Mais qui, un jour, s’est demandé ce que lui voit ?

La femme de ménage, silhouette en mouvement, effacée par la fonction. Elle nettoie l’empreinte du jour précédent, rend invisible les traces des réunions qui ont crispé les visages et les dossiers qui ont pesé sur les épaules. Elle fait disparaître le stress imprimé sur les tables, les hésitations griffonnées sur un bout de papier, les frustrations abandonnées sous une pile de documents. Avant l’aube, elle est là. Après la tombée du jour, elle repasse. Et pourtant, elle demeure invisible. Qui, un jour, s’est arrêté pour voir ce qu’elle efface ?

Le stagiaire, présence discrète dans un monde où il cherche sa place. Il écoute plus qu’il ne parle, hoche la tête avec application, prend des notes comme si chaque phrase prononcée était une clé vers une porte encore verrouillée. Son ambition est un feu qu’il ne sait pas toujours comment alimenter. Il est prêt à donner, prêt à apprendre, prêt à prouver. Mais qui lui tend réellement la main ? Qui, un jour, s’est mis à sa place pour ressentir la fragilité de sa position, l’attente lancinante d’une reconnaissance, la peur d’être un simple fantôme dans l’entreprise ?

La secrétaire, chef d’orchestre silencieuse d’un chaos organisé. Elle sait qui entre, qui sort, qui tarde à répondre aux emails, qui évite les réunions. Elle devine les tensions avant qu’elles n’explosent, anticipe les urgences avant qu’elles ne deviennent crises, désamorce les conflits par un simple ton de voix bien ajusté. Mais sa compétence, souvent, se dissout dans la routine. Qui, un jour, a mesuré la valeur de son rôle au-delà de ce qu’elle organise ?

L’employé, ce rouage qui fait tourner l’ensemble sans jamais être célébré. Il exécute, ajuste, optimise, parfois sans mot dire. Il absorbe la pression des échéances, les changements brusques de stratégie, les décisions imposées d’en haut sans explication. Il sait que son travail a du sens, mais il sait aussi que son nom pourrait être remplacé demain sans que l’organisation ne vacille. Qui, un jour, a cherché à comprendre l’usure du quotidien, l’impact du manque de reconnaissance, la fatigue de l’anonymat dans une structure où l’individu s’efface sous la fonction ?

Le directeur, silhouette lointaine, perçue comme inaccessible. On le craint, on l’évite parfois, on le flatte aussi. Il signe, valide, arbitre. Il est le point culminant de décisions qui traversent toute l’organisation, et pourtant, il est souvent le plus seul. Entre la pression des résultats et la nécessité de préserver l’équilibre humain, il navigue dans une mer où chaque choix laisse des vagues. Qui, un jour, a imaginé le poids d’un choix mal compris, la solitude d’une décision nécessaire mais impopulaire, le paradoxe d’une position qui impose d’être fort même lorsque l’on doute ?

Et si nous échangions les rôles ?

Si, juste un instant, nous devenions ce gardien qui observe plus qu’il ne parle. Cette femme de ménage qui nettoie ce que personne ne voit. Ce stagiaire qui absorbe les mots sans qu’on lui demande ce qu’il pense. Cette secrétaire qui rend fluide ce qui pourrait être chaotique. Cet employé qui porte le quotidien sur ses épaules. Ce directeur qui prend sur lui des responsabilités dont peu mesurent la charge.

L’entreprise est un organisme vivant. Chaque individu en est une cellule essentielle, chaque fonction un organe interdépendant. Si l’un faiblit, c’est l’ensemble qui vacille. La compétence ne se mesure pas au diplôme ni au titre, mais à l’impact réel de celui qui agit. Je

Comprendre la valeur des autres

Dans un monde du travail en mutation, la rigidité des hiérarchies doit laisser place à une approche plus humaine, plus adaptative. Le management du futur ne peut plus être une simple gestion des processus, il doit être une orchestration des potentiels.

L’analyse de la conduite du changement nous enseigne que la transformation d’une entreprise ne se décrète pas, elle se construit. Elle repose sur trois leviers

– L’écoute organisationnelle prendre en compte les réalités de chaque acteur de l’entreprise
– La reconnaissance des compétences identifier et valoriser les talents cachés derrière les titres
– L’agilité décisionnelle permettre à chacun de contribuer et d’apporter sa vision

Trop d’entreprises se privent de richesses inexploitées simplement parce qu’elles ne prennent pas le temps d’écouter. Trop de talents sont sous-estimés parce qu’ils n’entrent pas dans des cases préétablies.

Et pourtant, c’est en reconnaissant la valeur de chacun que l’on construit des organisations plus fortes, plus humaines, plus performantes.

L’entreprise ne devrait pas être une somme de fonctions, mais une synergie de talents.

Coach Oumar Sy

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