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Mon Quotidien / Épisode 3 : Sur la route de Mbagne, aux racines du fleuve et des liens ancestraux

Il y a dans le voyage vers Mbagne une profondeur que les kilomètres parcourus ne sauraient à eux seuls révéler. Chaque tournant, chaque village traversé semble porter un écho lointain, une résonance à la fois douce et poignante. Sur cette route, à la lueur encore timide de l’aube, mon esprit vagabonde, partagé entre la nostalgie de Thialgou, cette terre que je ne pourrai pas fouler cette fois-ci, et l’impatience de découvrir Mbagne, une ville où se tissent les fils d’une tradition ancienne et immuable. Je passe à proximité de Thialgou, et bien que mes pas ne m’y conduisent pas aujourd’hui, je sens son souffle, son ombre bienveillante m’accompagner dans ce voyage.

Nous dépassons bientôt Boghé, puis Carrefour, Bababé, et enfin Niabina, des lieux où chaque pierre semble chargée de récits. La route serpente et nous conduit vers Mbahè, avant d’annoncer notre arrivée à Mbagne, ou Thielbé Mbagne Samba, comme on la nomme respectueusement ici. Cette ville, bercée par les eaux paisibles du fleuve Sénégal, me reçoit dans son giron comme une mère retrouverait un enfant parti depuis trop longtemps.

Mbagne n’est pas une simple étape. Elle est vivante, animée par les traditions des Soubalbè, ce peuple de pêcheurs qui ont fait du fleuve leur allié et de la terre leur refuge. Ils cultivent la patience et la persévérance, deux vertus héritées de leur longue histoire, en pratiquant l’agriculture, l’artisanat et le commerce avec un respect profond pour leur environnement. Chaque pas dans cette ville est une immersion dans l’essence même de la culture pulaar, où chaque maison raconte une histoire, où chaque visage est une empreinte indélébile de la force de ces habitants.

Mon ami et collègue, Mohamed Mangane, avait tenu à ce que je découvre Mbagne à ses côtés, me guidant à travers ses ruelles étroites et sinueuses. À mesure que nous progressons, je remarque que derrière chaque porte se cache un pan de sa vie, un fragment de son histoire. Ici, chaque demeure mène à un cousin, un frère, un grand-père ou une tante. Les portes ne sont pas de simples passages ; elles sont des seuils ouvrant sur des récits familiaux, des souvenirs partagés, des liens de sang qui unissent les âmes de Mbagne en un réseau indissoluble. Ce n’est pas une simple ville, c’est une constellation de familles, toutes reliées entre elles par ces fils invisibles qui traversent les générations et les épreuves.

Ce qui frappe immédiatement en arrivant à Mbagne, c’est la chaleur humaine qui émane de ses habitants. Les visages, marqués par le soleil et le vent, sont sculptés par le travail de la terre et du fleuve. Les mains, rugueuses, semblent avoir été forgées par le labeur, portant les traces des champs qu’elles labourent, des filets qu’elles tirent, des outils qu’elles manient avec la précision de ceux pour qui le geste est à la fois travail et prière. Les yeux, quant à eux, sont perçants, empreints de cette sagesse ancestrale qui ne se transmet que par l’expérience de vies entières dévouées à la terre, à la communauté, et à la foi.

La maison d’Aissata Taye épouse de feu Amadou Déguel, la majestueuse mère du Dr Mangane père de Mohamed, où nous avons été reçus, incarne à elle seule l’âme de Mbagne. Au bord du fleuve, elle s’élève comme un sanctuaire de la tradition familiale. Les jardins qui l’entourent débordent de vie : des manguiers, des citronniers, des menthes, et des salades, autant de fruits de la terre que chaque famille cultive avec soin. C’est là un héritage direct de la caravane humanitaire qui, à sa première édition, avait distribué des arbres fruitiers à chaque foyer. Aujourd’hui, ces arbres sont devenus des symboles vivants de la résilience et de la prospérité de Mbagne.

Au sein de la maison, l’accueil est empreint d’une chaleur époustouflante. Les frères, sœurs, cousins, et oncles de Dr Amadou Mangane, ce dentiste de renom, se rassemblent pour nous accueillir avec des sourires francs et des gestes pleins de douceur. Chacun porte en lui la marque de cette hospitalité légendaire qui fait la fierté des familles de Mbagne. Les conversations s’enchaînent, et rapidement, les plaisanteries et récits de cousinage entre les Diop et les Sy, ou encore entre les Mangane, Mbodj, et Niang, s’élèvent dans l’air comme des échos de traditions lointaines. Chaque nom, prononcé avec respect et amusement, semble tisser un lien invisible entre les générations, un rappel constant que, ici, la famille n’est pas seulement un concept, elle est une réalité quotidienne.

Le matin suivant, le bruit des moutons et des chèvres dans la cour nous tire doucement de notre sommeil. Par l’une des trois portes de la maison, des écoliers passent avec une insouciance joyeuse, s’arrêtant quelques instants pour boire dans un canari avant de reprendre leur route vers l’école, située juste de l’autre côté du chemin. Cette simplicité des gestes, cette communion silencieuse avec la nature environnante, rappelle l’essence même de la vie à Mbagne : un respect profond pour le temps, pour la nature, et pour les liens humains.

En fin de matinée, je rejoins Mohamed et sa famille autour d’un déjeuner frugal, mais empli de sens. Nous discutons des programmes de formation que nous allons animer dans le cadre de la caravane humanitaire : entrepreneuriat, renforcement des capacités, marketing digital, et sensibilisation au changement climatique. Ici, il ne s’agit pas simplement de transmettre des compétences ; il s’agit d’aider ces jeunes à se forger un avenir tout en respectant leurs racines et en préservant leur identité culturelle.

La caravane médicale, quant à elle, est une œuvre d’une noblesse rare. Les médecins, venus de tout le pays, offrent leurs soins dans des spécialités aussi variées que la cardiologie, la pédiatrie, l’ophtalmologie, et bien d’autres disciplines. Mais ici, chaque soin est plus qu’un acte médical : il est un geste de solidarité, un pont tendu entre les générations, une réaffirmation de la dignité humaine.

À mesure que l’après-midi approche, nous nous dirigeons vers la place centrale de Mbagne. Les installations sont en cours de finalisation, et l’effervescence qui règne autour de l’organisation est palpable. Cette place, cœur battant du village, est le lieu de toutes les rencontres, de toutes les célébrations. Elle incarne cette cohésion unique, cette capacité qu’ont les habitants de Mbagne à s’unir pour le bien commun. Ici, chaque individu, chaque famille, chaque geste semble être une offrande à la communauté, un acte de partage et de soutien mutuel.

Je ne peux m’empêcher de songer à Thialgou, cette terre qui a forgé en moi ce profond respect pour les symboles et les gestes simples. Thialgou, bien que loin, semble toujours présent dans mon esprit, comme une étoile fixe dans ce ciel changeant. Mais ici, à Mbagne, je retrouve cette même essence : la religion, la foi musulmane, le respect des anciens, et cette capacité à faire de chaque geste quotidien un acte empreint de spiritualité et de sens.

Dans quelques heures, la caravane humanitaire ouvrira ses portes, et avec elle, une nouvelle page s’écrira dans l’histoire de Mbagne. Je suis honoré d’être ici, d’assister à cette œuvre de solidarité et de partage, et je vous promets de vous tenir informés des moments forts qui marqueront cette aventure.

Coach Oumar Sy

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