Par Coach Oumar Sy
Quand Sy Lamine et moi nous retrouvons autour des projets d’annonceurs, c’est toujours une collision intrigante entre idées et visions. Nos échanges, souvent silencieux, s’inscrivent dans cette dynamique où chaque réflexion stratégique se confronte à la matérialité d’une image, où la lumière devient un vecteur narratif et où l’ombre suggère ce que les mots ne peuvent capturer. Nous ne travaillons pas : nous déchiffrons. Et cette lecture des attentes et des rêves des entreprises mauritaniennes est un art qui mêle stratégie analytique et esthétique sensorielle.
Lamine ne photographie pas : il écoute. Sa caméra devient un diapason sensible aux vibrations de l’espace. Lorsqu’il cadre une scène, que ce soit une manufacture industrielle, une boutique artisanale ou un champ agricole, il ne saisit pas seulement une réalité visible, mais les flux invisibles qui connectent ces lieux à leur essence. Les textures des matériaux, les nuances des teintes, le jeu des reflets – tout cela parle à travers lui, racontant l’histoire de ces secteurs.
Prenons un projet dans l’agriculture. Dans ce secteur, où la productivité domine les discours, Lamine s’attarde sur l’intimité du geste : une main calleuse qui fend la terre, une goutte d’eau glissant le long d’une feuille de mil, la lumière rasante qui dessine des sillons infinis. Pendant ce temps, je trace les grandes lignes d’une stratégie de positionnement qui, au-delà des promesses fonctionnelles, exalte l’authenticité et la durabilité. La segmentation ici n’est pas qu’un exercice analytique : elle devient une cartographie de sens.
Dans la mode, les défis sont différents. Ce n’est pas la matière qui séduit, mais l’histoire qu’elle porte. Une étoffe wolof, un bijou soninké, une tenue traditionnelle haratine : chaque produit est une passerelle entre des héritages multiples et des aspirations contemporaines. Lamine capte la danse des plis, le jeu de lumière sur un motif brodé, l’ombre portée d’une manche qui oscille sous une brise. Mon rôle, en parallèle, est d’harmoniser ces récits dans des stratégies qui parlent aux jeunes urbains en quête d’authenticité, aux femmes rurales attachées à la préservation des traditions, ou encore aux diasporas en quête d’un lien sensoriel avec leurs origines.
Mais la subtilité de ces collaborations réside dans notre capacité à traduire le tangible en symbolique. Lorsqu’un annonceur dans l’énergie nous confie une campagne, il ne s’agit pas seulement de vanter l’efficacité d’une technologie ou la capacité d’un réseau. Lamine traduit cette promesse en une lumière vacillante dans un village reculé, en un faisceau qui perce une nuit profonde, révélant des visages illuminés d’espoir. De mon côté, je structure cette vision en une stratégie qui touche les décideurs tout en résonnant auprès des communautés locales.
Dans le secteur bancaire, où l’austérité domine souvent les campagnes, nous cherchons à humaniser les récits. Un guichet n’est pas qu’un service : c’est un lieu où se croisent des destins. Lamine capte un sourire derrière une vitre, le froissement d’un billet qui change de main, l’éclat métallique d’une pièce tombant dans une tirelire. Ces fragments deviennent, dans ma stratégie, les points de connexion avec une clientèle en quête de confiance et de proximité.
Chaque secteur exige une approche unique, et c’est là que réside la richesse de nos collaborations. Nous ne proposons pas des solutions uniformes : nous sculptons des expériences. Le commerce, par exemple, ne se résume pas à une transaction. Dans les marchés de Nouakchott, où se mêlent odeurs épicées et couleurs éclatantes, Lamine capte les mains qui s’entrelacent dans une négociation, le reflet d’une balance rouillée sous un rayon de soleil, les ombres mouvantes d’un étal au crépuscule. Ces détails sensoriels nourrissent mes stratégies, transformant chaque campagne en un récit immersif.
Ce qui nous anime, c’est cette quête d’équilibre entre l’abstrait et le concret. L’image de Lamine est une proposition, une invitation à ressentir, à interpréter. Ma stratégie, en écho, est une structuration, une mise en récit qui donne à cette émotion une direction. Nous ne produisons pas des contenus, nous façonnons des dialogues entre les marques et leurs publics.
Mais le véritable défi réside dans l’adaptation. Les entreprises mauritaniennes naviguent entre des identités multiples, des exigences locales et des ambitions globales. Leurs campagnes doivent résonner autant auprès d’un commerçant peul qu’un entrepreneur maure, d’une femme wolof qu’un jeune soninké. Cette diversité, bien que complexe, est une richesse que nous cherchons à sublimer.
La lumière, pour Lamine, n’est pas un outil : c’est une voix. Une étincelle qui parle aux ombres, qui souligne des contrastes, qui crée une tension. Mon rôle est de prolonger cette tension en un récit cohérent, de transformer l’instant capté en une stratégie durable. Ensemble, nous construisons des ponts entre ce qui est vu et ce qui est ressenti, entre l’image et l’idée.
Dans chaque projet, nous ne cherchons pas seulement à répondre à une demande, mais à la dépasser, à suggérer des vérités que l’annonceur lui-même ne soupçonnait pas. Le marketing mauritanien, dans toute sa diversité, a besoin de cette profondeur, de ce retour à l’essentiel où chaque geste, chaque mot, chaque image trouve son sens.
Coach Oumar Sy
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